Les poissons du marais audomarois
Le marais de Saint-Omer et de Clairmarais comprend une riche faune aquatique rassemblant plus de 25 espèces de poissons ! Poissons carnassiers, poissons fouilleurs, poissons fourrage, blancs, mollusques… Voici une petite liste des espèces piscicoles que l’on rencontre le plus souvent dans le marais audomarois, leur mode de vie, leur habitat, leur mode de reproduction, leur alimentation… Nous y avons bien sûr ajouté la moule d’eau douce et la célèbre écrevisse américaine qui sévit également dans notre contrée.
Les poissons carnassiers du marais audomarois
Ils chassent comme personne, sont de coriaces prédateurs… Le brochet, le sandre, la perche… Voici les dents du marais audomarois !
Le brochet
Voici le prédateur le plus sérieux pour les poissons du marais : le brochet. Très reconnaissable à son corps allongé et son museau pointu, le brochet tient justement son nom de cette particularité de son anatomie, faisant penser à une broche.
Le brochet ou plutôt le grand brochet est un poisson imposant s’adaptant autant aux eaux saumâtres qu’aux eaux douces. On le trouve surtout dans les eaux mortes, riches en végétation (milieux lentiques). Il aime en effet les rivières offrant des caches afin de pouvoir chasser en embuscade. Il se reproduit notamment dans les prairies inondables.
Plutôt solitaire (il se déplace souvent seul ou par groupe de 2 ou 3), le brochet peut mesurer entre 30cm et 1,10m, pour un poids pouvant s’élever au-delà de 10kg. Il a une espérance de vie pouvant dépasser les 20 ans.
Le brochet est partiellement protégé, en raison de la diminution de la population. Il souffre en effet de plusieurs maux, comme la pollution, l’activité humaine, les techniques de drainage, la pêche abusive et le braconnage, l’artificialisation des berges, la disparition de nourriceries, l’eutrophisation de l’eau et la turbidité trop importante de celle-ci. Notons également la disparition progressive des prairies inondables, propices à sa reproduction.
La période de frai survient de février à avril dans une eau dont la température est comprise entre 5 et 12 °C.
La perche
La perche commune est une espèce de poissons d’eau douce appartenant à la famille des percidés. Bien plus petite que le brochet, la perche peut mesurer jusqu’à 55 cm et se déplace en groupe pour chasser et vivre (poisson grégaire). A un âge avancé, la perche affirme un caractère plus solitaire. Elle chasse particulièrement les mollusques, les petits poissons, les insectes et petits animaux aquatiques. En cas de disette, elle peut se rabattre sur les végétaux ou envisager le cannibalisme.
Présente dans de nombreuses rivières d’Europe, la perche fut autrefois largement introduite ici et là pour la pêche sportive.
Ce poisson aime les eaux douces et calmes et apprécie les endroits où il peut se cacher. Pour chasser, il est doté d’un véritable détecteur de vibrations, de bons yeux et d’un organe de goût ultra performant.
En matière de reproduction, la perche pond en fin d’hiver près du fond ou des berges, sur des plantes aquatiques ou des branches immergées servant de frayères.
Le sandre
Le sandre est une espèce de poisson carnassier d’eau douce pouvant néanmoins s’adapter aux eaux saumâtres. Le nom Sandre viendrait de l’allemand Zahn signifiant « dent ». Sa taille peut varier entre 30 cm et 90 cm en moyenne, quoique certains spécimens pêchés ont déjà atteint 1,25 m !
Si le brochet nage et chasse entre deux eaux, le sandre préfère les eaux plus profondes.
Notons que ce poisson chasse des poissons bien plus petits que le brochet. En effet, bien que la gueule du sandre soit large, son gosier est bien plus étroit. Ils mangent ainsi beaucoup d’écrevisses et de poissons de fourrage.
Sa reproduction a lieu dans un nid situé à environ 1,5 m de fond, du mois d’avril au mois de juin, lorsque la température de l’eau avoisine 12 à 14 °C.
Le sandre aime les grands cours d’eau aux flots lents et aux fonds de sable ou de graviers, ainsi que les eaux calmes des lacs, étangs et réservoirs — à condition que le fond ne soit pas boueux et qu’ils soient d’une profondeur suffisante. Le marais audomarois constitue ainsi un lieu idéal de vie pour ce poisson carnassier.
Notons que bien qu’il soit plutôt diurne, le sandre possède une excellente vision nocturne.
L’anguille
L’anguille d’Europe ou anguille commune est une espèce de poisson aux allures de serpent, appartenant à la famille des Anguillidés. L’anguille peut peser jusqu’à 4 kg et mesure en moyenne entre 40 cm et 1m (certains spécimens peuvent faire 1,5m).
Il s’agit d’un poisson migrateur qui va, au cours de sa vie, passer par des milieux présentant différents taux de salinité. L’anguille migre ainsi vers la mer, notamment pour se reproduire.
Poisson extrêmement résistant et rustique, l’anguille est capable de respirer l’air et d’accepter la pollution. Toutefois, son corps l’accumule et fixe les métaux lourds et autres agents polluants, rendant ainsi sa consommation fortement réglementée.
Malheureusement, l’anguille est aujourd’hui une espèce fortement menacée. En cause : la pollution, les installations de pompage ou de drainage, le parasitisme, mais aussi et surtout la surpêche et le braconnage de l’anguille au stade de civelles, dans les estuaires. Il faut près de 3000 civelles pour un kilogramme et ce met se vend à prix d’or sur certains marchés, faisant figure de caviar…
Il fut un temps ou la pêche aux anguilles dans le marais audomarois était libre. Bon nombre de maraîchers ont le souvenir des parties de pêche « à la houppe » durant les soirées orageuses d’été. Désormais, cela n’est plus qu’un vieux souvenir…
Les poissons « blancs » : poissons de fourrage, poissons fouilleurs et benthiques
Voici quelques espèces de petits poissons communs ainsi que les poissons dits « blancs ». Cette appellation n’a rien à voir avec leur couleur apparente, mais à leur chair pâle. En cuisine, on oppose généralement les carnassiers aux blancs dont le goût présente moins de caractère.
Les poissons de fonds et eaux profondes, poissons fouilleurs
Dans le fond des rivières du marais s’épanouissent bon nombre de poissons fouilleurs, tels que la carpe, la tanche, la brème…
La brème
La brème commune se caractérise par son corps plat, sa petite tête et sa bouche protractile (se dépliant vers l’avant). Elle se distingue de la brème bordelière grâce à cette particularité, mais également grâce à sa couleur bronze au niveau des flancs et son dos gris-vert, alors que la brème bordelière est plutôt argentée.
Ce poisson courant dans le marais audomarois mesure 30 à 50 cm et jouit d’une durée de vie moyenne de 20 à 25 ans. Il vit en groupe dans les eaux calmes et les fonds vaseux et limoneux. En ce sens, notre marais est parfais pour elle !
Comme la carpe, ce poisson fouilleurs est benthivore et filtre les sédiments qu’il met en suspension. En ce sens, il participe à la turbidité de l’eau et joue un rôle dans le mélange des couches d’eau. La brème se nourrit également de végétaux, de zooplancton, de petits mollusques et de larves. Dans la vase, la brème commune côtoie souvent la brème bordelière et le gardon, au point qu’il n’est pas rare que ces poissons s’accouplent.
En se nourrissant dans les fonds et la vase, la brème peut, comme tout poisson fouilleur, bio-accumuler des polluants ainsi que les métaux lourds et s’intoxiquer.
Sa période de reproduction est située entre mai et juin.
La carpe
Comme la brème, la carpe est un poisson vivant dans le fond et se nourrissant dans la vase (benthivore). En remettant en suspension les sédiments pour les filtrer, elle tend, comme tout benthivore, à rendre l’eau trouble (toutefois, deux fois moins que la brème). En outre, la carpe est omnivore et se nourrit notamment de débris végétaux, de mollusques, de larves…
La carpe commune présente un corps allongé brun-verdâtre, des nageoires épaisses et souvent rouges-orangées, une tête en forme de cône et une bouche protractile à lèvres épaisses et barbillons. Elle mesure en moyenne 60 cm pour 7-8kg, mais certains spécimens peuvent atteindre plusieurs dizaines de kg !
Cet animal qui fut peut être le premier poisson d’élevage de l’histoire, est plutôt nocturne. Il est photophobe (allergique à la lumière). La carpe préfère alors les fonds, les zones sombres et est plus active au crépuscule. L’hiver, la carpe s’enfouit dans la vase et ralentit considérablement son activité. Elle se reproduit majoritairement de juin à juillet.
La carpe est réputée pour sa longévité, ( 15 à 20 ans d’espérance de vie moyenne), mais certains spécimens ont atteint le centenaire !
La tanche
La tanche est un poisson d’eau douce appartenant à la famille des cyprinidés. Nous la rencontrons assez régulièrement dans le marais audomarois.
La tanche présente un corps forme allongé verdâtre et une peau recouverte de mucus. Elle peut atteindre 70 cm. Sa bouche est munie de barbillons, lui permettant de fouiller la vase. Plutôt solitaire, elle passe l’hiver dans la vase, comme la carpe.
Elle s’alimente de petits mollusques, de larves, de débris de végétaux.
La période de reproduction de la tanche s’étend de mai à juillet, dans les eaux dormantes et peu profondes, riches en végétaux.
Autres petits poissons du marais audomarois
Le gardon
Le Gardon est une espèce de poisson d’eau douce que l’on retrouve dans notre marais et qui est généralement appelé « roche ».
Ce poisson grégaire (vivant en groupe) et plutôt sédentaire, présente une petite taille, un corps allongé, des nageoires rouges. Sa nageoire dorsale et ses nageoires ventrales sont positionnées sur le même axe vertical.
Ce poisson aime les eaux profondes, mais s’adapte à toutes circonstances ! Il peut ainsi coloniser des petits watergangs de 20-30 cm de fond, des bras morts d’un canal en pleine ville… Il apprécie toutefois la profondeur en hiver et nage en surface l’été.
Le gardon est par ailleurs rustique et résiste à la pollution. Il tolère ainsi les eaux polluées, mais aussi les eaux tièdes, les eaux pauvres en sédiments, les eaux saumâtres…
Le gardon se nourrit de petits mollusques, de larves d’insectes, d’insectes tombés à l’eau ou prélevés en surface et de végétaux.
Le frai a normalement lieu entre avril et juillet.
Le goujon
Le goujon est une espèce de petits poissons d’eau douce, d’une quinzaine de centimètres maximum. Il apprécie les eaux calmes, les rives peu profondes, et les fonds sablonneux ou limoneux.
Le goujon est grégaire : il vit en groupe et se déplace en banc
C’est un poisson fouilleur qui explore le fond grâce à deux barbillons placés de chaque côté de la bouche. Il se nourrit de débris de végétaux, de larves, d’insectes, de zooplancton, de petits mollusques…
Le goujon pond de mai à juin, dans les courants forts et parmi les pierres et la végétation. Le goujon fuit les eaux polluées. En ce sens, sa présence est un bon présage. Il est considéré comme un bon bio-indicateur de la qualité de l’eau.
L’ablette
L’ablette est un petit poisson d’eau douce aux écailles argentées mesurant entre 8 et 18 cm. Son espérance de vie est de 3 à 6 ans.
Ce poisson grégaire se déplaçant en banc se nourrit de petits mollusques, de petits insectes, de larves d’insectes, de petits crustacés et de débris de végétaux.
Elle se reproduit de mai à août près des berges et sur les zones peu profondes
L’épinoche
L’épinoche est un petit poisson osseux présentant a priori entre 7 et 16 espèces différentes. Elle tient son nom de ses épines dorsales. Ces dernières servent de protection contre les prédateurs, ce qui n’empêche pas l’épinoche de constituer un excellent repas pour le brochet, le héron ou l’aigrette.
L’épinoche est un poisson effectuant de petites migrations des eaux marines, saumâtres ou douces, mais sa reproduction se réalise toujours en eaux douces, de mars à juillet. A cette occasion, le mâle endosse des couleurs vives avec son dos vert et son ventre rouge, servant à une sorte de parade nuptiale.
L’épinochette
L’épinochette présente un corps plus effilé que l’épinoche et davantage d’épines dorsales. Elle est aussi un peu plus petite (9cm max). Dépourvue d’écailles, elle présente un dos et des flancs brun clair avec des taches sombres.
La période de frai de l’épinochette s’étend d’avril à mai.
Autres types d’animaux aquatiques du marais audomarois
L’écrevisse
Le marais audomarois présentait jadis quelques espèces autochtones d’écrevisses d’eau douce. Mais une autre espèce prit le pas : l’écrevisse américaine, qui fut (par erreur ?) introduite en Europe aux alentours des années 1880. Les premiers spécimens auraient été introduits en Allemagne.
L’écrevisse américaine s’adapte à de nombreuses situations et est très résistante. Elle se nourrit de toute sorte de débris organiques et végétaux, mais aussi des petits poissons comme l’épinoche ! Elle peut également vivre en filtrant le plancton. Elle est active de jour comme de nuit et supporte la pollution et les écarts de température.
En raison de son mode de vie et ses attaques, elle contribue à la disparition des espèces autochtone d’écrevisses. En ce sens, elle est considérée comme un redoutable nuisible.
L’anodonte ou la moule d’eau douce
La moule d’eau douce ou l’Anodonta est un mollusque bivalve très présent dans le marais de Saint-Omer, comme dans de nombreux cours d’eau d’Europe.
La moule d’eau douce se déplace extrêmement lentement dans le fond des rivières. Elles jouent un rôle de filtre à eau en se nourrissant d’impuretés. En ce sens, elle fixe les polluants, les toxines, les métaux lourds qui s’agrègent dans ses tissus et constitue donc un mollusque toxique.
Si l’homme ne peut la manger, elle fait les délices de bon nombre d’animaux du marais audomarois, comme la carpe, le rat musqué l’hiver, le foulque macroule et le grèbe huppé.
D’une espérance de vie importante (plus de 20 ans), la moule d’eau douce peut présenter une taille considérable (parfois un diamètre supérieur à 20 cm). Ce mollusque a pour habitude de se servir des poissons pour faire éclore ses œufs, en dissimulant des larves dans leurs branchies. En contrepartie, la bouvière, petit poisson parasite, pond dans la coquille de l’anodonte, dont le sang sert de repas aux alevins.
Sources:
Nature en Caps et Marais d’Opale