La maison du marais constitue un patrimoine traditionnel à sauver !
Il existe plusieurs types d’habitats traditionnels dans le marais de Saint-Omer et plus largement, dans le marais audomarois. Mais certaines caractéristiques communes permettent de définir la maison du marais typique.
Ces demeures sont malheureusement en péril. Beaucoup ont cédé place à des maisons davantage modernisés. Nombre d’annexes, de granges et autres éléments architecturaux ont également disparu avec le temps.
Partons à la découverte de la maison du marais !
L’humain et les maisons du marais typiques font partie intégrante du marais
Le marais est labellisé « Man and Biosphere» grâce à sa nature luxuriante, mais aussi en raison des activités humaines qui permirent ses aménagements.
En somme, cet immense espace naturel n’aurait pas la physionomie actuelle sans l’œuvre de nos aïeux… Et sans les activités humaines contemporaines !
Dès ses premiers aménagements, le marais devint une zone de pêche et d’agriculture. Depuis, nous continuons à curer les fossés, à cultiver les terres, à y pêcher, à y chasser, à y habiter. On y construit des bateaux depuis le XIIème siècle et on s’y promène volontiers en barque depuis des centaines d’année. Rien d’étonnant donc que cette reconnaissance de l’UNESCO place les Hommes au même plan que la nature. Nous faisons partie de cette nature et de ses paysages !
Parmi les trésors composant notre territoire, la maison du marais a donc toute sa place. Nous voulons bien entendu parler de l’habitat typique, traditionnel et du patrimoine bâti gravitant autour de ces demeures.
Les maisons du marais audomarois autrefois
Autrefois, notre marais était peu peuplé, ne comptant que quelques modestes maisonnettes construites en torchis ou en pierre avec un toit de chaume. Ces habitations rurales ont subi une transformation radicale au XIXe siècle grâce à l’avènement généralisé de la brique et de la tuile. Pendant cette même période, le marais et ses environs ont connu une forte croissance démographique avec l’arrivée de la première gare à Saint-Omer. Cette révolution industrielle et la création de polders à la manière hollandaise ont effectivement favorisé l’essor de la culture du chou-fleur. Les maisons du marais étaient alors différentes en fonction de leur emplacement, mais elles respectaient toutes certaines contraintes imposées par les métiers de leurs occupants et les spécificités de l’environnement.
La maison du marais typique : la longère
Au XIXème siècle, les personnes les plus aisées ont choisi de s’installer dans les faubourgs pour des raisons de commodité. Le Haut-Pont se situait près de la ville, de la gare, des places de marchés et des terres fertiles constituant le bassin alluvionnaire de l’Aa.
Les travailleurs agricoles modestes ont quant à eux préféré s’implanter au cœur du marais, sur des petites iles ou des « presqu’îles ». Le faubourg de Lyzel a également rapidement accueilli des familles modestes et des agriculteurs de la classe moyenne. Ces maraîchers ont opté pour un style de maison appelé « longère », une construction basse, étroite et allongée, s’étendant selon l’axe de la faîtière. Ces maisons du marais audomarois étaient construites en briques et possédaient un toit pentu recouvert de pannes flamandes. Les murs laissaient la brique apparente ou étaient recouverts d’un badigeon de chaux, tandis que le soubassement était enduit de goudron.
A quelques mètres de la maison du marais, au bord de l’eau, un noyer protégeait de ses ramures l’escute et le bacôve rangés contre le quai de briques. Ce dernier était agrémenté d’un « pucheau », petit escalier avançant vers la rivière, permettant de laver les légumes. Pour information, le terme « puchoir » nous vient du vieux picard et signifie tout simplement simplement « puiser ».
Autour de la maison, les berges naturelles bénéficiaient d’une double protection. Celle du sol têtard, d’une part. Ses racines maintiennent fermement les bordures. D’autre part, les berges étaient également soutenues par un fascinage. Il s’agit d’une sorte de barrière de maintien composés de grosses branches de saule faisant office de piquets, et de plus petites branches entrelacées placées à l’horizontale. Ces branches provenaient bien sûr de la taille régulière (tous les 5 ans) des saules têtard. Aujourd’hui, le fascinage à l’ancienne tend à revenir timidement sur le devant de la scène. Les saules têtards demeurent en nombre
Autres annexes et installations gravitant autour de la maison du marais
Outre les installations classiques sur les berges, un certain nombre d’installations et de constructions entouraient la maison du marais. Elles étaient liées au siège d’exploitation et participaient à la pratique du maraîchage ainsi qu’à la vie familiale.
La maison du marais comprenait également :
- Un potager avec les légumes les plus fragiles, journalièrement surveillés
- La grange construite en planches à clin avec soubassement en brique
- La serre
- L’étable pour le cheval
- Les châssis pour faire pousser les plans de légumes
- Un hangar plus imposant avec l’arrivée des machines agricoles
- La salle de forçage à endive et les installations pour cultiver les endives de pleine terre. Il s’agissait de petits hangars avec circuit de chauffage enfoui dans le sol fonctionnant à l’eau et au charbon. Certains hangars étaient même mobiles car déplaçables sur rail !
- La cave à charbon
- Les toilettes à l’extérieur
- La cuisine à légumes permettant de stocker au frais les produits de la récolte avant le marché.
- Un poulailler
Les Maisons du marais dans les faubourgs de Saint-Omer
Nous retrouvons ces éléments depatrimoine le Doulac, autre faubourg de Saint-Omer, mais aussi et surtout dans le faubourg de Lyzel. Le long de sa rivière principale, le Dromweg, s’étale un habitat traditionnel semi-groupé. Les maison sont reliées à la route de Clairmarais par des petits ponts en ferronnerie affichant pour certains un style rappelant l’Art Nouveau de la fin du XIXème siècle.
Outre la longère classique, d’autres types de demeures des faubourgs comportent un toit à deux pans et ligne de bris, de type « toit à la Mansart » permettant d’optimiser l’occupation des combles.
Dans le faubourg du Haut-Pont, l’habitat est cette fois-ci groupé et semi-urbain. La taille des maison laissait ici autrefois transparaître le rang social des propriétaires. La taille du porche (appelés localement « grande porte ») se présentait également comme un signe ostentatoire de réussite. Nous pouvions donc distinguer les maisons des ouvriers, petites habitations basses, des maisons des exploitants, bien plus imposantes.
Derrière la maison du marais typique, nous pouvions également constater dans le Haut-Pont la présence d’une grange constituée de planches à clins, d’une étable, … Ainsi que des petits canaux ! Chaque maison du marais faisant office de siège d’exploitation présentait un accès direct par bateau.
Autres éléments de patrimoines disparus ou amenés à disparaitre
Outre la maison du marais traditionnelle commençant à se faire rare, d’autres éléments de patrimoines disparaissent peu à peu. Citons notamment les moulins à vent de drainage. Ces derniers permettaient de gérer les eaux des polders. Le dernier, le Moulin de l’Aile, a été soufflé par une tempête en 1948. Nous retrouvons aujourd’hui ce moulin reconstitué avec sa vis d’Archimède aux abords de l’embarcadère de la Maison du Marais. Depuis, ce sont les motopompes ainsi que les pompes électriques qui se chargent de l’évacuation des eaux au sein des polders.
Autre installation ayant disparu de nos paysages : l’éolienne. Nous ne voulons pas parler ici d’éolienne électrique, mais d’éolienne de pompage. Ces dernières faisaient remonter l’eau du marais pour arroser les champs à l’aide d’un piston et de pales.
Pour conclure
La maison du marais traditionnelle participe à la beauté de notre marais et crée de véritables paysages de cartes postales. Pour l’attrait touristique de Saint-Omer, pour notre cadre de vie et pour la sauvegarde de nos traditions, il devient urgent de sauver ce patrimoine. A ces demeures s’ajoutent toutes les annexes et les éléments de patrimoines bâtis gravitant autour de l’habitat maraicher.
Un trésor à préserver, au risque dans le cas contraire de modifier outre mesure la physionomie des lieux, déjà impactée depuis quelques décennies…